(Troisième et dernière partie)
Ne sommes-nous pas
davantage dans l’objet d’addiction ?
Je n’ai aucun
problème avec le « doudou » tant qu’il reste à sa place d’objet. Ce
qui me pose question c’est le doudou
exclusif et surtout toutes les aberrations auxquelles il donne souvent lieu.
Nous avons parlé du raccourci que représente le « doudou » consolateur
qui, au-delà de l’objet transmet à l’enfant qu’il en a besoin pour être bien.
Combien d’enfants tristes recherchent leur doudou plutôt que les bras d’un
adulte ? Quand ce n’est pas l’adulte qui le lui propose quand il se met à
pleurer… par facilité peut être ?
Si Clotilde, 2 ans,
perdait son doudou qu’elle a déjà en trois exemplaires, elle pourrait ne pas
s’endormir le soir, personne ne pourrait la consoler, traumatisée, elle
pourrait souffrir (Mignon, 2007). Les doudous sont ainsi clonés pour la
protéger de la souffrance.
Souvenons-nous que
la fonction de l’OT décrit par Winnicott étant de maintenir une continuité
menacée par la séparation, cet objet pour autant qu’on y croie est donc voué à
disparaître.
Cet objet va
pourtant devenir indispensable pour intégrer des structures comme la crèche. Et
même les crèches qui souhaitent respecter le choix des parents exigent un objet
rappelant la maison. L’absence de doudou inquiète, angoisse. Le doudou est donc
devenu une règle imposée jusque dans nos institutions…
Ne devons-nous pas
apprendre à nos enfants à progressivement se séparer de nous et les aider à
intégrer le fait que la séparation fait partie de la vie ? Plutôt que de
masquer l’absence et par là même de penser l’absence du père et de la mère
comme dangereuses (Mignon, 2007).
Au lieu de proposer
un objet comme réponse à une souffrance liée à la séparation, reconnaître cette
souffrance, la nommer, y répondre avec nos paroles, notre corps sont des
propositions de l’auteure face à cette souffrance qui est une marque de notre
humanité.
Lorsqu’ Israël (2007)
termine son article « Doudou or not to do » en ces termes: “Le doudou
est indispensable à bébé pour lui permettre d’être, à travers lui, en se
passant de sa maman ». Pour l’anti-doudou exclusif que je suis à titre
personnel, cette conclusion m’a fait bondir à la première lecture. Mais quand
on comprend que le choix se situe et c’est ce dont il est question dans
l’article, entre faire de sa mère un doudou ou proposer un doudou à l’enfant,
dans ce cas, je comprends la conclusion de l’auteur. Il s’agit là, dans
l’intérêt de l’enfant de la solution la moins pire.
L’observation de
nos enfants va dans le sens de mon intime conviction : nos enfants ont
tout ce dont ils ont besoin en eux, pour être bien, tout en ayant le droit d’aller
mal. Ils ont en eux, ce qui leur est nécessaire pour vivre le plus sereinement
possible la séparation ! Encore faut-il les y préparer et les accompagner
le mieux possible en fonction de la singularité de chacun. Le doudou a
assurément besoin d’eux pour exister, mais eux, n’en n’ont pas besoin ! Je
nous laisse réfléchir à ce scoop pur chacun de nos enfants…
Oui, nous pouvons
dire à notre enfant : tu as tout ce qu’il te faut pour être bien ! Tu
n’as pas besoin de doudou, c’est doudou qui a besoin de toi ! Explique-lui
que tu as besoin de tes deux mains pour manger et qu’il peut t’attendre à tel
endroit… A vous de créer vos limites en fonction de votre mode de vie.
Assurément, si c’est l’enfant qui décide, il aura envie de l’emporter avec lui
partout. C’est notre responsabilité de le rassurer et lui dire aussi souvent
que possible que « tout va bien » même quand on n’est pas dans le
meilleur des mondes, cela vaut beaucoup plus pour l’être en construction qu’il
est que n’importe quel objet !
Nous pouvons
l’aider à construire une sécurité qui vient de l’intérieur et non de
l’extérieur. Qui vient de lui, et non de l’objet.
Parents, ne
détournons pas la fonction du « doudou », ne laissons pas le doudou
nous remplacer ! Remplacer nos paroles, nos bras, notre regard…
Winnicott nous a
expliqué qu’après la phase de « dépendance absolue» du nourrisson à sa
mère, celui-ci peut progressivement accepter les frustrations de la séparation
et par- là même avoir le sentiment d’exister comme individu distinct. Le doudou
est donc la première possession de l’enfant qui est extérieure à son propre
corps, qui participe à sa constitution comme individu (Perino, 2007). Ni plus,
ni moins.
Que ce soit un jus
de fruit ou le doudou, ne laissons pas des objets remplacer nos paroles, nos
échanges, la relation que nous souhaitons construire avec nos enfants !
Le manque,
l’absence, la souffrance peuvent se gérer autrement qu’à travers un objet, quel
qu’il soit. Encore faut-il savoir comment s’y prendre !
Si chaque parent
met l’énergie et le temps nécessaire pour aider son enfant à trouver une
sécurité qui vient de l’intérieur et qui se voit à l’extérieur et non pas
l’inverse, les structures accueillant nos enfants (crèches, écoles) n’auraient
pas à gérer les doudous et pourraient se concentrer sur le reste… à savoir :
nos enfants eux-mêmes !
Comment
apprenons-nous à nos enfants que la vie continue malgré l’absence, la
souffrance, le manque ?
Avec des bases
sécurisantes, point besoin d’objet de transition. L’essentiel se jouera au niveau
du vécu de l’enfant, de son entraînement ou pas à anticiper le déroulement de
ses journées…
Quand bien même
vous considérez « le doudou » comme utile pour votre enfant, ne
laissez pas le transitionnel devenir indispensable !
Pour être
accompagné dans la mise en place d’une routine adaptée permettant à votre bébé de
ne pas être accro au doudou, doudou dépendant, contactez-moi dès la
naissance de votre bébé et de préférence avant. Vous verrez qu’il est possible
et même plus simple de faire sans.
S’il en a déjà un,
vous pouvez l’aidez à ne l’utiliser que pour ce qu’il est : un objet.
S’il est déjà
accro, encadrez au moins son usage. Comme nous l’avons vu, le doudou n’est pas
universel. Si en plus il est traîné partout en votre présence sans aucun cadre,
il perd son sens initial !
Après tout, chacun
fait comme bon lui semble. Ce qui me pose question en matière de doudou va plus
loin que le doudou ou pas ? C’est surtout ce que l’enfant perçoit
lorsqu’en réponse à une éventuelle souffrance légitime liée à la séparation ou
à autre chose, on lui tend son doudou, pour le consoler, le doudou, pour
l’aider à s’endormir, doudou, pour se sentir en sécurité, doudou par-ci, doudou
par-là… Pas étonnant le récit de certains parents qui font des kilomètres dans
le sens inverse quand le doudou devenu indispensable est oublié, quand ils
n’ont pas plusieurs exemplaires du même. On peut même le retrouver sur internet
quand il se perd !
« Si l’enfant
s’éloigne de sa mère, c’est d’abord pour rencontrer d’autres personnes plutôt
que des objets » disait une collègue d’Afrique de l’Ouest de Jean-François
Rabain à laquelle il fait référence dans son article « Le doudou, ça
n’existe pas ».
Bien qu’il s’agisse
d’un domaine sensible pour certains, peut-être sans importance pour d’autres
(parce qu’il y a toujours plus grave), je nous invite à la réflexion dans nos
réactions et dans nos pratiques parentales en partant de l’observation de notre
bébé et non pas de ce que les gens font en général.
Vous saviez déjà que
la majorité n’a pas forcément raison, maintenant, vous savez que le doudou
n’est pas indispensable ! Ne le subissons pas.
Pour savoir comment
aider votre bébé à ne pas devenir un accro du doudou, Contactez-moi sur : http://www.mjcoaching.com/contact.php
pour un accompagnement mensuel personnalisé.
Israël Jacky , « Doudou «
or not to do » » , Spirale, 2007/3 n° 43, p. 53-64. DOI
: 10.3917/spi.043.0053
Mignon Pascale , « Au pays des doudous clonés » , Spirale, 2007/3 n° 43, p. 39-45. DOI :
10.3917/spi.043.0039
Perino Odile, “Les
doudous, des jouets comme les autres ? », Spirale, 2007/3 n°43,p.65-68. DOI :
10. 3917/spi. 043. 0065
Rabain Jean-François , « Le doudou, ça n'existe pas » , Spirale, 2007/3 n° 43, p. 19-25. DOI
: 10.3917/spi.043.0019